Le défilé des Pfengstknechte (valets de la Pentecôte) est une très ancienne coutume alsacienne.

Le cortège regroupait à l'origine les valets de ferme puis, avec la disparition de cette profession, les jeunes garçons.

Le jour de la Pentecôte, les Pfengsknechte arpentaient les rues des villages et s'arrêtaient à chaque maison pour quémander de la nourriture en vue d'un grand festin pour célébrer le retour des longs jours ensoleillés et la générosité de la nature.

« A Eschbach, le Pfengstendrack a la figure barbouillée de suie par ses camarades. Ils le coiffent d’un Boschhut, chapeau conique constitué par de la Boschrinde (écorce d’arbre) et surmonté d’un bouquet de fleurs. Au sommet intérieur du cône est suspendu un grelot de collier de cheval. Le chapeau est parfois orné de plumes multicolores (d’oie, de canard, de poule) et de rubans en papier de diverses couleurs. Tous les participants au cortège portent des sabres de bois, plus rarement de vrais sabres.» (Schely : 1930-1937 selon Dr. Mayumi SEKIZAWA et Dr. Takanori SHINTANI professeurs à l’université Kokugakuin de Tokyo, professeurs émérites du Musée nationale d’histoire venus à Eschbach en 2011 dans le cadre d’études sur les traditions de la Pentecôte).

Louis DIBLING avait confectionné une telle coiffe à son fils Jacques, aîné de la classe 1959 : un chapeau de lanières de frênes tressées surmonté d’une clochette. Il se souvient également des sabres, des vrais puis des faux, car interdits durant la guerre, qui servaient à inciter les habitants à verser le tribut de la Pentecôte : des oeufs ou du lard, une tranche de la truie, ni trop petite, ni trop grande pour ne pas abîmer le havresac comme le dit la chanson :

               Eyer, Eyer, oder Spack

               Von de Moor ä sit e wag

               Nit so klein, net so gross

               Das de Hawersack nit verstosst

               Hey, Hey, Hey ! Hey, Hey, Hey !

Aujourd'hui cette tradition presque éteinte en Alsace demeure à Eschbach. Un temps fort de la vie des filles et des garçons dans leur 13e année, chargés de faire claquer les fouets de la Pentecôte !

Le bruit du fouet symbolisant le bruit du vent produit par la descente du Saint Esprit ?

Une interprétation quelque peu étrange de l’acte des Apôtres, comme le note à juste titre un chroniqueur : « Tout à coup, il vint du ciel un bruit comme celui d'un violent coup de vent, qui remplit toute la maison où ils étaient assis ».

Auguste Ball 1954, instituteur à Eschbach de 1945 à 1973, affirmait : « La forêt fournira toujours les ormettes. Quelqu’ancien tressera toujours les fouets, le désir ardent d’accéder au commandement fera le reste ».

De mémoire d’Eschbachois, la tradition locale veut qu’un ancien (René Baumann, notre employé communal est devenu l’agent agrémenté) fabrique des fouets avec des lanières d’orme récolté dans la forêt d’Haguenau et que chaque classe d’âge fasse à son tour claquer les Pfenschtegeischle dans les rues du village à la Pentecôte (autrefois le dimanche, de nos jours la veille).

Le chef, l’aîné du groupe, rythme la cadence à coups de sifflet. Depuis quelques années, la tournée des Pfenschtekneller se termine à la salle polyvalente pour la fête de la musique Vogesia.

Dans la soirée, les jeunes qui n’ont pas manqué de s’exercer plusieurs semaines durant essayent de rivaliser avec les anciens heureux de retrouver des émois de leur jeunesse.

Le lendemain, nos Pfengschdekneller arpentent à nouveau le village et sonnent à chaque porte afin de quémander : du lard, des œufs mais, de nos jours, surtout des pièces sonnantes et trébuchantes ou même de beaux billets de banque qui serviront quelques années plus tard à l’achat de la panoplie des conscrits, autre tradition locale à pérenniser ! 

Source : article de Marie-Line Weiss, paru dans le bulletin municipal d'Eschbach n°96 - mars 2018